Conseils pour bien s’alimenter sur une épreuve cyclosportive
Dans des articles précédents, on a fait un point – sans doute incomplet – sur diverses thématiques qui intéressent le cycliste au chapitre de son alimentation: le poids et la condition physique, la perte de poids, les besoins énergétiques. Mais, ces questions traitées, il faut maintenant passer au coeur du sujet, c’est-à-dire ce qu’il convient de faire avant l’épreuve, pendant l’effort et après.
Ces 3 phases vont nous guider dans cet article.
Une petite précision introductive d’abord. Le fait que j’ai titré sur une « cyclosportive » ne limite pas la portée de mes conseils aux cyclosportifs stricto-sensu. En effet, les cyclotouristes au long cours et les cyclos avertis qui s’embarquent dans des raids sur plusieurs jours ou simplement décident de faire sur une journée une belle étape montagnarde, sont également concernés.
Le terme épreuve est donc employé ici an sens large. Et nous savons tous que gravir le Galibier, l’Izoard ou le Ventoux représente bien une épreuve.
1 – Préparation d’une épreuve
L’épreuve cycliste ne commence pas le matin du jour dit, mais plusieurs jours avant. En fait, tout commence bien avant puisque la façon dont cette sortie vélo particulière va se dérouler dépend notamment de l’entraînement qui aura été suivi au préalable et depuis le début de saison, de son état de forme qui découle aussi pour partie de son alimentation en général. Bref, si l’on veut mettre un maximum de chance de son côté, il faut se préparer dans la durée.
11 – Les jours précédents l’épreuve
Concentrons-nous ici sur les 3 jours qui précédent le jour J. Commencez par alléger l’entraînement avec une ou deux sorties courtes et de faible intensité. Tout en maintenant l’habitude de pédaler (et toute la gestuelle du cycliste), il s’agit de récupérer des efforts précédents, et de reprendre des forces en reconstituant ses réserves. La recharge en énergie s’opère en emmagasinant du glycogène lent, ce qui se fera d’autant plus aisément que le cycliste est bien entraîné. C’est le stockage des fameux sucres lents. Ah, les pâtes, toujours al dente, car seule cette cuisson garantit l’assimilation progressive des glucides.
La gageure est d’engranger de l’énergie sans en avoir les effets néfastes: encombrements intestinaux, jambes lourdes, perte de force. Pour ce faire, les repas des derniers jours sont adaptés, en consommant des mets riches en glucides et en protéines. Pour faciliter la digestion, on évitera de prendre ces deux catégories de nutriments au cours du même repas: féculents le midi et protéines le soir, en inversant l’ordre la veille de l’épreuve.
Parmi les aliments à éviter, citons la charcuterie, les agrumes, et en général les fruits non mûrs.
12 – La veille de l’effort
La veille du jour J et particulièrement le soir, on laissera de côté les oeufs, la viande rouge car elle est longue à digérer (et source de déchets dans le sang), les pommes de terre, les légumineuses (ballonnements), le lait (se digère assez mal pendant l’effort).
Tout en mangeant très raisonnablement en terme de quantité, et en s’hydratant convenablement, on privilégiera les viandes blanches (blanc de poulet ou de dinde) ou un poisson blanc en filet ou darne, cuit à la convenance de chacun (four, grillé, court bouillon) et consommé sans sauce.
Comme on a aussi besoin de lipides (en petites quantités), on n’écartera pas systématiquement le beurre cru, l’huile d’olive, les yaourts.
2 – L’alimentation pendant l’effort
21 – Le matin de l’épreuve
Avant de parler de la période de l’effort proprement dite, n’oublions pas le matin de l’épreuve. Et oui, il ne faut pas partir la fleur au fusil. Trois règles sont à respecter le matin de l’effort: prise du repas 3 heures (éventuellement 2 heures 30, mais c’est le maxi) avant le départ, alimentation adaptée, digestion rapide. Ce dernier repas ne sert qu’à éviter l’hypoglycémie, les réserves en sucre ayant été constituées les jours précédents.
Le repas d’avant épreuve sera léger. Il comprendra à nouveaux des sucres lents: un peu de pâtes (si vous pouvez les ingurgiter tôt le matin !), des céréales (ne pas les noyer dans du lait), un yaourt ou un gâteau de riz. On aura compris que ce n’est pas le moment de consommer des protéines, ni des aliments acidifiants: viandes, fromage, oeufs, chocolat.
Complétons ce paragraphe par le concept de « ration d’attente« . Pour faire court, disons que le stress d’avant départ peut générer chez certains une hypoglycémie dite réactionnelle. Et l’absorption simultanée de sucre entraînera une amplification du phénomène (décharge d’insuline): c’est le but inverse à celui recherché. Les nutritionnistes qui ont travaillé sur cet aspect de l’alimentation du sportif conseillent des solutions diététiques à placer entre le dernier repas et le démarrage de l’épreuve. Dès lors, la ration d’attente consiste à boire par petites gorgées et à intervalles réguliers, au cours des 2 à 3 heures déjà évoquées et avant l’échauffement, une boisson au fructose. Et, peu de temps avant le départ, on prendra une barre énergétique, avec un peu de boisson à l’effort courante.
22 – S’alimenter au cours de l’épreuve
Ce point est crucial. En général, quand on a un bon entraînement de base, jusqu’à 100/110 kms, ça va (suivre les meilleurs, c’est toutefois un autre problème). C’est ensuite que ça se gâte. Plus l’épreuve est longue, et a fortiori si elle est exigeante (dénivelé important, rythme, températures élevées ou froides), plus la nécessité de manger et boire s’impose dès le départ (et non pas au-delà de la « barrière » des 100kms !).
Si certains diététiciens pensent que l’absorption de liquides (appropriés bien sûr) suffit, je pense que la plupart des coachs et pratiquants ressentent le besoin d’ingorgiter du solide. J’en fais partie. En fait, il faut associer les deux.
Utilisez des aliments solides qui se digérent facilement. Pour cette raison, les barres chocolatées sont à éviter; en outre, il leur faut de 6 à 8 heures pour entrer dans les tissus. Ce qui est très bien, ce sont les barres énergétiques, pâtes de fruits (il en existe de variées), d’amande, les bananes (mûres), les fruits secs (figues, abricots, pruneaux), du pain d’épices, une part de biscuit de Savoie, un gâteau de semoule de riz (pas trop facile à emporter, c’est vrai).
Au niveau de la fréquence de consommation, comptez 1 à 2 barres (selon difficultés de l’épreuve) par heure. Pour le gâteau de riz, appliquer une fréquence à deux heures. On peut aussi prendre des gels énergétiques, de plus en plus prisés par les cyclistes: énergie très concentrée, faible encombrement. L’inconvénient c’est, qu’en faire ensuite ? Surtout ne pas jeter sur la chaussée les tubes vides (il existe maintenant des petits packs qui, avec des sangles, de fixent facilement sur le tube supérieur de son vélo; peut-être pas très esthétique, mais ça vaut mieux que de ranger les tubes vides et collants dans une poche arrière du maillot).
Il n’est pas inutile de rappeler qu’il faut manger avant d’avoir faim. En effet, une interruption d’apport glucidique, ne serait-ce que de 30 minutes, et la fringale est en vue ! Bien évidemment, cette alimentation solide doit impérativement être accompagnée de boissons, car l’effort entraîne des pertes hydriques (transpiration). Cette perte peut être de 1 à 2 litres par heure. On va également brûler beaucoup de nutriments et minéraux. Il faut donc recharger tout cela en permanence, au risque d’avoit là-aussi une panne de carburant.
Pour s’hydrater, on consommera par petites gorgées (donc régulièrement, toutes les 10 minutes par exemple, un quart d’heure maxi) une boisson glucidique (les glucides absorbés en liquide vont rapidement dans le sang). On peut faire sa boisson énergétique soi-même, en mettant 4 ou 5 morceaux de sucre blanc dans un grand bidon d’eau, ou avec du jus de fruits dilué (faire des essais au préalable pour savoir si vous digérez bien ce type de boisson pendant un effort soutenu), du sirop. Il est judicieux, l’été pendant les grandes chaleur, d’ajouter dans le bidon ainsi constitué, 1 gramme de sel (toujours pour un grand bidon). Surtout, ne jamais boire une boisson froide.
L’idéal, c’est de disposer de deux bidons différents et de pouvoir effectuer ses « recharges » en cours de route (sachets *dans la poche), s’agissant du bidon énergétique. Avec le second, on ingérera plutôt une boisson destinée à se désaltérer: par exemple, thé au citron, peu sucré. Eviter le café (peut accélérer la déshydratation par son effet diurétique) et les sodas (perturbent le fonctionnement du tube digestif). Et, à l’occasion (un arrêt à un ravito par exemple), boire un peu d’eau pure pour changer du goût sucré, ou s’asperger en cas de grosses chaleurs, cele ne fait pas de mal.
*je pense en particulier à une boisson énergétique à hautes performances – vendue par une société de diététique sportive bien connue – aux vertues antioxydantes (vitamine C, zinc) et comportant du calcium et du magnésium. Ce produit est disponible en sticks de 30 grammes, à diluer directement dans un bidon d’eau pure.
3 – La récupération
Trop content d’avoir atteint son objectif (terminer l’épreuve, atteindre le sommet d’un col mytique, réaliser un bon temps, …), on peut oublier cette phase importante que représente la récupération. La récupération repose sur 3 priorités: réhydrater, détoxifier, reconstituer les réserves.
L’hydratation permet de compenser les pertes en eau et d’éliminer les déchets fabriqués pendant l’effort. Dès la fin de l’épreuve – terme toujours employé au sens large – penser à boire (par petites quantités répétées) une eau gazeuse bicarbonique sodique, telle Perrier, Vichy, Vals ou Badoit. Ce type d’eau minérale facilite lélimination des déchets acides. Eviter les sodas, le cola, les boissons fruitées, ainsi que la bière.
Ensuite, on continuera à boire jusqu’au repas du soir, de l’eau non gazeuse, telle Hépar, Vittel, Contrex. Un bon indice pour savoir si vous êtes bien réhydrater: des urines claires. Plus tard, on pourra boire une boisson énergétique, un jus de fruits, un thé ou une tisane.
S’agissant de l’alimentation solide, il faut savoir qu’après l’effort, les muscles continuent à brûler du glucose. Par conséquent, consommer rapidement du solide: au choix, une barre céréale, des fruits secs, du pain d’épice, des biscuits, un sandwich au gruyère.
Lors du 1er repas qui suit, on prendra des aliments glucidiques d’assimilation lente (pâtes, riz, céréales, pommes de terre sauf en purée) et des aliments alcalinisants (carottes, salades, tomates, asperges). Pour le dessert, une banane ira très bien car elle est riche en potassium.
Voilà l’essentiel concernant cette phase de récupération. Pour ceux qui veulent en savoir plus, on trouve sur le net et dans des ouvrages spécialisés des précisons scientifiques sur la question, ainsi que des programmes de récupération détaillés pour les heures qui suivent la fin d’une épreuve, et jusqu’au soir.
Nota:
Beaucoup de pratiquants confectionnent eux-mêmes leurs boissons et consomment des barres de céréales, fruits secs, etc… que l’on trouve aisément dans le commerce. Mais il existe des sociétés spécialisées en diététique sportive. On peut acheter leurs produits par correspondance (site internet) ou les trouver chez les vélocistes. Ces sociétés proposent diverses gammes de produits destinés à répondre aux 3 points traités ci-dessus: avant, pendant et après l’épreuve. A titre indicatif, je citerai dans le désordre www.mx3store.com/ www.overstims.com/ www.isostar.fr/ www.powerbar.co.uk/ www.go2sport-nutrition.com/ www.fenioux-multisports.com/
On peut aussi citer: Gatorade, Powerade, Lucozade.
En cherchant bien , on en trouve d’autres. Un conseil, n’utilisez jamais un nouveau produit lors d’un rendez-vous important. Il vaut mieux l’essayer à l’entraînement pour voir s’il vous convient. Personnellement, je suis habitué à une marque, et n’ai pas envie d’en changer, bien que je suis convaincu que chaque marque propose des barres, gels et boissons performantes.
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Conclusion
Certaines personnes, avant de commencer la lecture d’un livre, vont directement aux dernières pages de l’ouvrage pour découvrir le dénouement. J’avoue avoir souvent pratiqué de la sorte en milieu professionnel, s’agissant de rapports ou d’études. Alors, pour celles et ceux qui ont cette habitude, je vais conclure cet article en mettant l’accent sur les points essentiels.
La priorité pendant les 2 ou 3 jours précédents, c’est de constituer son stock de glycogène lent, tout en s’hydratant normalement. Le dernier repas du jour J se prend 2h30 à 3 heures avant le départ. Privilégiant encore les sucres lents, il doit être composé d’aliments à digestion rapide. Penser à la ration d’attente.
Pendant l’épreuve, appliquer le vieil adage: manger et boire avant d’en resentir le besoin. Procéder par petites quantités, 1 à 2 barres par heure selon les circonstances, et à intervalles de 10 minutes environ pour les boissons. L’apport glucidique doit être en effet régulier pour éviter la fringale.
Quant à la récupération, elle est destinée à la réhydratation, à la détoxification, et à la reconstitution des réserves.
Voilà, à vous de jouer maintenant, et bonne route.
Louis
(publié le 16 mai 2014)
Bibliographie:
Au-delà de mon expérience et de mes pratiques personnelles, j’ai puisé un certain nombre d’informations dans l’excellent ouvrage de Christian Vaast – Les fondamentaux du cyclisme – tome 1 – Editions Amphora, avril 2003.
5 réactions au sujet de « Conseils pour bien s’alimenter sur une épreuve cyclosportive »
Bonjour Louis,
Toujours intéressant,les conseils,les avis, en ce qui me concerne ,mon petit niveau
je prépare même mes boissons avec malto,sirop d’agave ,sel.. etc trouvé sur
internet.
Les boissons, barres,gel, je trouve que cela reviens assez cher, mais cela me
concerne.
Encore merci pour vos article.
Bien à vous Hervé
un article très important pour savoir comment s’alimenter a vélo.
Contrairement a hervé(mais c’est aussi très personnel) je prefere une boisson isotonique du commerce car moins acide pour mes intestins.Chacun trouve ses petits en-cas…le but étant de bien les assimiler car j’ai tendance a ne pas avoir beaucoup d’appétit après 2H de route mais je me force pour éviter la fringale.(très mauvais souvenir surtout a mes débuts ou je ne prenais rien).
Merci Louis pour tes articles très pro!
Bravo pour cet article super pratique ! on peut vraiment construire quelque chose même si moi-même je n’ai pas trop la pratique de monter le Galibier ! je vais corriger illico certaines de mes habitudes : boissons trop fraîches ou féculents et céréales mélangés ou le fromage…
Séries d’articles intéressants. Même à raison d’un article par jour, va me falloir du temps pour tout lire !
Comment concilier le fait de faire une sortie et de prendre le petit-déjeuner 3 h heures avant ? (soit se lever à 6 h00 du matin pour prendre la route à 9h00)
Bonjour,
Mon site a 4 ans. Et il y a forcément quelques redondances dans certains articles.
Dans l’exemple, je parle de la participation à des cyclosportives (pour lesquelles on se lève toujours relativement tôt, surtout s’il faut se déplacer en voiture). On peut toujours absorber du liquide peu avant le départ, mais pour le solide – surtout si c’est une préparation copieuse destinée à faire face sans problème aux 90/100 premiers kilomètres – il vaut mieux respecter la règle des 2 heures.
Cordialement,
Louis